Utilisation du STAN : retour d’expérience de l’équipe du CHU de Tours

Le STAN 31 est un moniteur de surveillance fœtale qui permet d’analyser l’électrocardiogramme du bébé à naître au cours du travail et de l’accouchement. La maternité du CHU de Tours a décidé d’utiliser plus largement cet appareil. Le Pr Franck Perrotin, chef de service, nous explique pourquoi les professionnels de cet établissement ont fait ce choix.

Contrairement aux cardiotocographes conventionnels habituellement utilisés lors de l’accouchement, le STAN 31 permet non seulement une analyse du rythme cardiaque fœtal (RCF) mais donne également accès à l’électrocardiogramme (ECG) fœtal. « Lors de l’accouchement, le bien-être fœtal est habituellement attesté par l’analyse de la fréquence du RCF et de ses variations, explique le Pr Franck Perrotin, chef du service gynécologie-obstétrique du CHU de Tours. Cette interprétation est toutefois très subjective, d’abord parce que le rythme cardiaque évolue tout au long du travail, ensuite parce que de nombreux paramètres, comme la fréquence de base, les oscillations ou encore les accélérations ou les ralentissements de la fréquence cardiaque doivent être analysés. L’interprétation d’un même rythme cardiaque fœtal peut donc varier d’un professionnel à l’autre. ». Le STAN 31 peut limiter ces variations d’interprétation en permettant aux professionnels présents en salle d’accouchement d’accéder à d’autres paramètres du bien-être fœtal par l’analyse complète de l’ECG fœtal. « Nous recherchons par exemple des modifications de l’ECG identiques à celles rencontrées lors d’un infarctus du myocarde chez l’adulte, précise le gynécologue obstétricien. Lorsque l’oxygène vient à manquer au fœtus, le myocarde fonctionne en anaérobiose. L’ECG alors se modifie. “

Le STAN 31 en deuxième intention
En pratique, l’équipe médicale de la maternité du CHU de Tours, comme toutes les équipes des maternités françaises, surveille le rythme cardiaque fœtal pendant toute la durée du travail. Ce dernier est, selon la présence ou non d’anomalies, classé en “normal”, “intermédiaire” ou “pathologique”. « Des anomalies sont présentes pour un accouchement sur deux environ, note le Pr Franck Perrotin, mais elles sont souvent liées à un simple réflexe du fœtus et ne correspondent que dans moins de 40% des cas à un manque d’oxygène pour le fœtus. » Comment dans ces conditions prendre les bonnes décisions et réaliser les bons choix pour la patiente et son enfant ? Le STAN 31 peut apporter des données supplémentaires et donc  affiner la prise de décision des équipes médicales. «  Nous utilisons le STAN 31 en deuxième intention lorsque le rythme cardiaque est dit “intermédiaire” ou “pathologique” et que nous suspectons donc une baisse du taux d’oxygène fœtal (hypoxie) », explique le chef de service. L’appareil offre une analyse de l’amplitude du complexe QRS (l’onde électrique de dépolarisation des ventricules) par rapport à l’amplitude de l’onde T (onde électrique de repolarisation des ventricules). Il s’agit du rapport T/QRS. « Je crois que l’analyse de l’ECG fœtal est un réel plus dans la mise en évidence des asphyxies périnatales, estime le médecin. Si l’anomalie est confirmée à la lecture des résultats, une césarienne peut être décidée ou l’accouchement accéléré. » L’utilisation du STAN 31 permettrait aussi, en évitant de se fier au seul signe d’alarme d’un rythme cardiaque anormal, de diminuer le nombre de césariennes réalisées, « ce qui est l’un des principaux objectifs de notre maternité, précise le Pr Franck Perrotin, nous étions à 21% il y a quatre ans et avons réussi à passer à 17,5%, sans augmenter le taux d’asphyxie chez les nouveaux nés, évidemment. Nous expliquons cette baisse par une plus large utilisation du STAN 31. »

Doubler le nombre d’accouchements sous STAN 31
Désormais, les équipes tourangelles, qui disposent de STAN depuis 6 ans, ont fait le choix, et ce depuis deux ans, de l’utiliser davantage. « Les premières années, nous nous en servions de manière très anecdotique, se souvient le Pr Franck Perrotin. Aujourd’hui notre objectif est de passer d’un taux d’utilisation de 15 à 30% de l’ensemble des accouchements . Nous souhaitons par exemple l’allumer de façon plus systématique dans certaines situations où la probabilité d’une anomalie du rythme cardiaque est importante. Je pense par exemple aux femmes enceintes hypertendues, diabétiques ou celles chez qui l’accouchement doit être déclenché.  Nous venons de réécrire nos protocoles pour augmenter le recours au STAN 31. »

Des études observationnelles1, 2 concluantes
Pourquoi miser davantage sur cet appareil depuis quelques mois ? Parce que la littérature scientifique a récemment évolué et a suggéré l’intérêt du STAN 31 dans les salles d’accouchement. «  Bien que les études prospectives randomisées n’aient pu démontrer la supériorité du STAN31 sur une simple analyse du rythme cardiaque fœtal, plusieurs études observationnelles arrivent à la conclusion que les équipes qui utilisent régulièrement l’appareil font baisser leur taux d’asphyxie périnatale, précise le Pr Franck Perrotin. Cette diminution n’est peut être pas à mettre au seul bénéfice du STAN 31 mais son utilisation large doit certainement y participer. Nous sommes en tout cas interpellés par ces résultats concordants. » L’autre intérêt du STAN 31 réside dans le fait qu’il s’agit d’un moyen de surveillance continue à la différence des mesures du pH au scalp, nécessitant un prélèvement au niveau du scalp du nouveau-né. Ces prélèvements ne donnent une valeur de l’équilibre acido-basique qu’au moment de la réalisation du prélèvement. « Bien sûr l’évolution de cet équilibre peut être suivie grâce à plusieurs prélèvements successifs mais, parfois, le rythme cardiaque se dégrade très vite et la surveillance continue du risque d’asphyxie proposée par le STAN31 se révèle souvent plus riche en informations », conclut le gynécologue.

Pour pouvoir se servir de façon plus large et plus fréquente de cet appareil, les membres de l’équipe ont été formés. « Toutes les sages-femmes et les médecins ont reçu une formations initiale à l’utilisation du STAN31, note le chef de service. Nous avons rendu cette formation obligatoire pour tout le personnel qui travaille en salle d’accouchement. Nous organisons également une réunion annuelle et des staffs STAN. Ces derniers nous permettent de nous réinterroger autour des dossiers les plus intéressants une fois tous les trois mois. »

 

Références

1- Kessler J, Moster D, Albrechtsen S. Intrapartum monitoring of high-risk deliveries with ST analysis of the fetal electrocardiogram: an observational study of 6010 deliveries. Acta Obstet Gynecol Scand. 2013 Jan;92(1):75-84.

2- Norén H, Carlsson A. Reduced prevalence of metabolic acidosis at birth: an analysis of established STAN usage in the total population of deliveries in a Swedish district hospital. Am J Obstet Gynecol. 2010 Jun;202(6):546.e1-7.

Clémence Lamirand
www.capitalmedical.fr – Avril 2013

Caractéristiques principales du STAN 31
Le STAN31 est un appareil qui permet de surveiller le rythme cardiaque fœtal et de l’analyser le segment ST de l’ECG fœtal (STAN pour ST analysis).
Il pourrait permettre de réduire le nombre d’acidoses sévères et de limiter le nombre de césariennes.

La maternité du CHU Tours en chiffres
La maternité du CHU Tours, maternité universitaire de type 3, réalise environ 4000 accouchements par an sur les 30000 naissances que compte la région Centre. Elle dispose de 2 STAN 31 sur 8 salles d’accouchement. Une équipe de 14 médecins, 90 sages-femmes, et 117 agents y travaillent (sans compter les pédiatres et anesthésistes).

# #